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01/02/2016-COP21, et après ? Pierre Forestier

Exposé

Mieux comprendre ce qui s’est passé lors de la 21eme conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP21),   conférence qui a abouti le 12 décembre 2015 à Paris au premier accord universel de lutte contre le réchauffement :

Les enjeux majeurs portent sur la consommation d’énergie. Les emplois du pétrole, du gaz, et surtout du charbon sont à l’origine d’une émission toujours plus élevée de CO2, gaz à effet de serre. Le C02 désormais émis dans l’atmosphère   dépasse la capacité d’absorption des forets et des océans, il forme écran et empêche l’évacuation de la chaleur terrestre. Ce problème commun à l’humanité, reconnu à RIO en 1992, nécessite un consensus international qui ne peut se construire que dans un cadre multilatéral et permettant l’expression et les engagements de chacun .

Le protocole de Kyoto en 1997 a été un premier pas. Plus de 40 pays s’engageaient alors pour réduire leurs émissions. Mais le développement rapide d’autres pays très peuplés   – Chine, Inde , Indonésie , Brésil… – a vite conduit à la diminution   de l’impact des engagements pris au regard du volume total constatée des émissions   ( de 60% à 25% environ) , rendant insuffisant les effets escomptés . La poursuite des travaux du GIEC , le groupement de scientifiques sur le climat, et les débats associés permettent la prise de conscience progressive que le réchauffement climatique actuel est du au développement humain – c’est un point essentiel –   et que c’est là un thème universel aux conséquences majeures . La nécessité d’engager tout le monde est progressivement reconnue. Mais comment construire un consensus international concret sur ce qu’il convient de faire ?

La conférence de Copenhague en 2009 est un échec. La méthode trop technocratique est contestée. La mise en cause mécanique du développement n‘est pas acceptée. L’approche de la COP21 a été radicalement différente : appel aux propositions de chacun , engagement de l’ apport possible par chaque pays , transparence des données, progressivité, diffusion des bonnes idées .., Et in fine , c’est l’ensemble de la communauté internationale (195 pays) qui consent à l’effort dans la lutte contre le dérèglement climatique   , avec en ligne de mire   l’objectif ambitieux de maintenir l’augmentation de la température moyenne « bien au dessous de 2° ».

La « pression » sur les Etats est venue non pas des opinions publiques peu mobilisées sur ces sujets mais du monde économique. C’est là un point nouveau et essentiel. Les acteurs économiques ont été parties prenantes à la fois dans les diagnostics et la prise au sérieux des enjeux, et dans les solutions. La prise en compte du réchauffement climatique dans leur stratégie est devenue plus offensive : nouvelles techniques , nouvelles démarches , nouveaux processus, d’autant que des sauts technologiques dans la technologie verte permettent l’émergence de services rendus à des prix similaires à ceux de dispositifs traditionnels . Des lors les entreprises deviennent elles-mêmes proactives sur le thème et contribuent par leur communication, la généralisation d’indicateurs significatifs formant repères à construire du progrès dans ce sens et en promouvoir la demande.

Les Collectivités locales aussi ont été des acteurs importants. Elles sont des désormais parties prenantes, souvent très « pusching » . Leur responsabilités à l’égard des territoires , leur proximité avec les habitants en souci de la qualité de vie et de l’environnement , leur préoccupations concrètes les rendent particulièrement réceptives d’autant que ce sont des institutions en émulation les unes par rapport aux autres . Présentes à la COP 21 elles ont contribué à une tension positive et exigeante.

 

Que ressort il de cette COP21  :

– une proposition actée de chaque pays à l’horizon 2030 avec étape 2020.

La tendance   avec les actions retenues conduit à +3° ,

– une volonté partagée d’aller plus loin et de limiter l’augmentation à au plus 2° avant 2100

– un mécanisme de révision des ambitions, tous les 5ans – la première étant prévue en 2025. Ajustement obligatoirement à la hausse. Il s’agit d’arriver à  un pic des émissions mondiales des gaz à effet de serre « dès que possible », et de «  parvenir à un équilibre entre les émissions liées aux activités de l’homme et les absorptions par des puits de Carbonne au cours de la deuxième moitié du siècle ».

– une différentiation des efforts des pays eu égard aux contextes nationaux mais aussi   à leur responsabilité historique dans le changement climatique (dette climatique). Engagements  de financement et d’aide aux pays les + pauvres : 100 milliards par an d’ici 2020

– des outils et principes méthodologiques renouvelés – transparence, suivi, contrôle d’efficience – dont la mise au point est l’objet de la conférence de Marrakech

 

Il n’est pas prévu de sanction financière. La transparence est la règle. La publicité des résultats fait escompter une boucle vertueuse.

 

Mais au-delà des décisions concrètes contenues dans cet accord (il doit entrer en vigueur en 2020 et prendre le relais du protocole de Kyoto) le sentiment, très positif, est d’enfin sortir d’une spirale d’échec, d’avoir désormais un cap . Il est acté que le monde a changé. Est-ce un accord historique ? oui si la dynamique créée se maintient, oui si le catalogue des engagements de chaque pays (proposé et convenu par lui-même) est respecté, oui parce qu’un nouveau cadre international permanent sur un enjeu absolument majeur   est mis en place avec accord unanime. C’est une première.

Mais un accord encore insuffisant car l’urgence n’est pas assez prise en compte. Et aussi parce qu’il ne porte que la signature des Etats ( quid de l’engagement des entreprises et en particulier des grandes entreprises mondiales ) .Et puis le risque existe de se contenter des + 3° !

 

Débat :

– Pourquoi pas d’accord sur un prix du CO2  ?

Les marchés du carbone vont se développer progressivement mais à l’échelle nationale  ou sur de grandes zones (comme l’Europe actuellement). Plus de convergence économique serait nécessaire   pour permettre de convenir d’ un prix administré au plan international. Un prix unique est actuellement illusoire mais des orientations de principe   peuvent être définies

 

-Quels sont les principaux moteurs  qui vont permettre de progresser?

Mon optimisme, notre confiance, s’appuient sur l’adhésion des entreprises et des grandes villes ou collectivités. Ils sont devenus acteurs et parties prenantes de la démarche. Pas tous mais en nombre suffisamment significatif pour qu’une dynamique soit créée. Coté entreprises sont moteurs les assurances , concernés   par les catastrophes potentielles du réchauffement climatique (mise en place de malus ), les banques qui voient des actifs importants fragilisés , les entreprises dont celles, nombreuses maintenant, concourant au développement de nouvelles technologies économes en énergie ou substitutives (énergie renouvelable ). Par ailleurs les grandes villes et les territoires deviennent demandeurs. Ils ont à répondre efficacement à la demande croissante des usagers et à la vigilance des associations et acteurs de la société civile. Les obligations sont aussi impulsées par les Etats (plans et schémas directeurs du type « plan climat énergie de Territoire »(PCET)), elles vont créer des dynamiques. L’action à ces niveaux locaux présente le grand intérêt d’ouvrir l’espace aux actions décentralisées.

 

– Effet de la baisse de prix du pétrole ? les prix du pétrole n’ont plus de rationalité économique. Ca ne change pas les enjeux climatiques et les réponses de la Cop 21

 

– Effet sur l’aide au développement ?

L’aide au développement menée en France par l’AFD comme pour d’autres institutions s’ajuste pour intégrer l’impact en terme d’effets de serre et de transition énergétique . La mise au point d’indicateurs appropriés est importante. C’est une préoccupation largement partagée tant par les structures d’aide que par les instances bénéficiaires. Il s’agit aussi d’aider les pays bénéficiaires à rendre réaliste leurs engagements, à apprécier leur impact contributif, à rendre plus efficientes les contributions .

A l’AFD, banque publique qui assure de l’aide au financement de projets de pays en développement, les projets soutenus sont de plus en plus au service des enjeux climatiques : 50% des 8 milliards d’investissements de l’ AFD vont participer aux problématiques liés au changement climatique.

 

– Résistances, mesures de riposte ?

Qui a intérêt ? …Les pays producteurs d’énergie Pétrole évoquent des compensations …

 

– N’êtes-vous pas trop optimiste ?   Quid de la nécessité d’un changement économique en profondeur ? D’une évolution de la consommation ? N’est ton pas au seuil d’une source majeure de conflits, de combats violents, d’une immigration climatique d’ampleur ?

Mon optimisme s’appuie sur cette volonté   partagée, perceptible à la COP 21, de sortir de l’échec, sur l’élan vital qui s’est manifesté. ! Il s’est passé quelque chose ! Emergence de nouvelles pratiques, de nouvelles technologies, d’expérimentations multiples   par des acteurs économiques et sociaux   souvent locaux, exigeants. ! Il n’y pas de modèle, des solutions émergent de débats où l’acceptation sociale environnementale, économique est essentielle.

Plus personne ne croit que le sujet est purement technologique. Le réchauffement climatique est le point d’entrée le plus pertinent, le levier le plus puissant pour l’action des acteurs économiques et socio économiques ; la recherche des réponses ouvre aussi sur l’idée de transition. Mais la sensibilisation de la société aux perspectives du réchauffement climatique reste un défi, le débat sur les modèles de société une question… Même une augmentation limitée en moyenne à 2° ne fait pas disparaitre tout problème. Comme toute moyenne elle cache des écarts. Ils peuvent été considérables selon les zones. Atteindre +10 ° dans des zones déjà chaudes et fragiles entrainera une désertification d’ampleur et, si le pays n’a pas de ressources à la hauteur de ces défis, des drames considérables. Des pays ne   pourront pas faire face seuls.

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