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02/10/2017 - Ordonnances Macron ? Frédéric Lerais.

Exposé

Les ordonnances « Macron » sont 160 pages de « simplification »du droit du travail. L’IRES est un centre de recherches pour l’ensemble des organisations syndicales. Il s’est penché sur leur examen

Je donnerai ci-après mon point de vue qui n’est pas le même (« plus près d’Eric Heyer que de Pierre Cahuc »)

J’ai beaucoup d’interrogations. On aurait dû faire une pause. Tout le monde est débordé dans les entreprises par les enchaînements de réformes ((Cf. en PJ le n° 155 de la chronique internationale de l’IRES).

Le marché du travail a été très affecté par la crise de 2008 suivie en 2011 par la crise des dettes souveraines qui va avoir des conséquences sur les politiques d’accompagnement en poussant à la mise en place de mesures « qui ne coûtent rien ». À cet égard la réforme du droit du travail est un sujet idéal. Les mesures de sécurisation de l’emploi prises avant 2011 ont été stoppées nettes.

Le PIB de 2017 n’est qu’à 2% au-dessus de celui de2008. On a retrouvé à peu près le même volume d’emploi mais avec beaucoup de temps partiel, en particulier pour les hommes.

Une étude du BIT a recensé 120 réformes de 2000 à 2007 et 400 de 2008 à 2013.

5 axes principaux pour ces réformes :

  1. Le droit du travail avec pour thèmes principaux la facilitation du licenciement, la baisse des indemnités de licenciement, la possibilité d’éviter le recours au juge, l’encadrement des réparations judiciaires en cas de licenciement abusif.
  2. La décentralisation des négociations collectives (En France elle date des lois Auroux de1982) avec beaucoup de limitations à la durée des accords et à l’extension possible des accords de branche ; la possibilité de négocier avec des représentants élus non syndicaux ; des réformes sur la représentativité syndicale.
  3. Plus d’incitations au retour à l’emploi.
  4. Les politiques « actives » : formation, accompagnement, contrôle des chômeurs. Resserrement sur les plus fragiles.
  5. La recherche de la baisse du coût du travail. Gel des minima sociaux, baisse des cotisations sociales couplées à l’embauche en CDI.

Et la France dans tout cela ? La France n’est pas dans l’immobilité qu’on mui prête. Les réformes s’enchaînent à un rythme effréné : Recours plus facile au CDD d’usage, renouvellement plus facile du CDD, introduction du régime des autoentrepreneurs, homologation d’accords majoritaires, augmentation des dérogations à la réglementation, loi sur la représentation syndicale de 2008, augmentation des dispositifs d’exonération des cotisations sociales.

Les ordonnances ? Elles concernent :

  • La sécurisation des licenciements avec le barème des indemnités prudhommales et a hausse des indemnités légales (Que dira le décret d’application ?), la simplification du licenciement économique (périmètre d’évaluation), des obligations plus légères de reclassement et une nouvelle procédure de départ volontaire : la rupture conventionnelle collective qui mettra fin à beaucoup de PSE..

Globalement c’est une sécurisation pour l’employeur. Le raccourcissement des délais complique la recherche de reclassements. Sur les Prudhommes, les recours avaient déjà beaucoup diminué avec les accords majoritaires. On fait du symbolique.

  • Fusion des instances. Elle était déjà possible avec la loi Rebsamen.

Nombre d’heures de délégation Il est douteux qu’en fin de compte elles augmenteront.

Pour les grandes entreprises (GE) la recentralisation des négociations salariales (CE ; CHSCT) pose des questions.

  • Articulation branche-entreprise. 11 thèmes sont réservés à la branche sans possibilité de dérogation. Pour le reste l’accord d’entreprise prime. On conforte un certain pouvoir de la branche.

L’accord d’entreprise devient un sujet important alors que pendant longtemps le patronat ne le souhaitait pas (renversement dans les années 80s.). Problème important : Que se passe-t-il lorsque le salarié ne vote pas l’accord d’entreprise ? (Cela existait déjà avec « l’accord de maintien de l’emploi » de 2013).

Il faudra vérifier que ceci ne mène pas à du dumping social et à supprimer le recours à des experts pour discuter des alternatives…

  • TPE-PME. Plusieurs modalités de négociation sont prévues dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux. Dans les PME, l’entreprise peut proposer un accord qui devra être validé majoritairement.

Qu’attendre de ces réformes ? L’évaluation n’est pas possible. Les économistes s’écharpent. L’indicateur de protection de l’emploi a un effet ambigu sur l’emploi. Il faut des évaluations empiriques, économétriques plutôt favorables pour les PE. Mais globalement ?? Il est sûr qu’à court terme il y a des effets négatifs. La comparaison entre les divers pays est bien difficile : comment prendre en compte la décentralisation dans les indicateurs ? Le BIT e voit pas d’impact important.

Débat

Q1. L’esprit général des ordonnances est d’abaisser les protections mais la décentralisation n’est-ellepas de nature à booster les syndicats qui se reposaient paresseusement sur les branches..

– Quand on parle de l’entreprise, jusqu’ici cela concernait les plus de 300 salariés alors que maintenant on s’intéresse aux TPE-PME.

– On se polarise sur les mesures techniques alors qu’on n’embauche pas les gens pour les licencier. On n’a paas pronooncé le mot « confiance » ; Pour l’embauche, la confiance est fondamentale.

– ces ordonnances ne sont-elles pas un premier plan d’une réforme plus importante (formation, assurance-chômage..) ?

R. On a commencé par les ordonnances. Pourquoi ?

On ne décrète pas la confiance. Pierre Cahuc est téléguidé. Le patronat est assez bien conforté. Sa joie est discrète. Le nombre de mesures de contournement des syndicats est étonnant. C’est une rupture d’affaiblissement des syndicats et de recours à eux.

En Allemagne, l’effet des lois Herz sur le chômage n’a été que de 10%. Le reste est ailleurs. Il faudrait pouvoir en parler. Par ailleurs beaucoup de PME sont des sous-traitants des grands groupes. Il y en a peu d’indépendantes.

Cela redonnera-t-il du dynamisme ? L’Espagne a cherché une forme de flexibilité interne pour passer les mauvais caps.

            Q2. Pourquoi les syndicats ne se mobilisent-ils pas plus ?

R. Il n’y avait pas plus favorable à la négociation d’entreprise que la CFDT. Pourquoi n’est-elle pas contente ?

Au lieu de favoriser le mandatement (des syndicats), ils ont plutôt ressenti les risques de contournement (Aller sur le site de la CFDT pour voir).

Q3. Que pensez-vous de l’extension des droits d’assurance chômage pour les travailleurs indépendants (autoentrepreneurs) ?

R. Quelles ressources ? Quelles règles ? L’effet est positif. On a montré que le sentiment de sécurité dépend du montant de l’indemnité chômage. Le modèle Danois (montant des indemnités) a été très affecté par la crise. Tout ne se joue pas sur les règles du marché du travail.

Q4. Comment les lois El Khomry s’emboîtent-elles dans les ordonnances ?

R. Des morceaux subsistent. Exemple : des grèves de chauffeurs qui se sont aperçus qu’ils pouvaient peser sur les primes à travers les accords d’entreprise.

Q5. L’évolution de la nature du travail ne remet-elle pas en cause la notion de branche ?

R. Les branches peuvent évoluer en fonction de l’économie. On avait 700 branches dont beaucoup de mortes. Le texte est muet sur les mutations du travail et de l’économie.

Q6. Peut-il y avoir encore une évolution du texte ?

R. Oui, en cas de défaut de constitutionnalité et à travers les décrets d’application notamment sur les ressources des syndicats. Le texte lui-même ne devrait plus bouger.

Q7. Pour les indemnités prudhommales, y a-t-il eu des expérimentations ailleurs ?…des craintes de recours à la justice ?

– Pouvez-vous revenir sur la méthode du gouvernement ? On a l’impression que les choses ont glissé plus facilement.

R. – Pour les indemnités prudhommales, il n’y a plus de prise de responsabilité dans la stratégie des entreprises. Les fantasmes sont supprimés. C’était une question de crédibilité de la loi.

Quand on licenciait dans une entreprise de moins de 20 salariés, l’indemnité minimum était de 6 mois de salaire mais on a pu obtenir plus. On a considéré qu’il y avait là une source d’imprévisibilité mais on ne peut quantifier à l’avance les conséquences d’un risque ! Sinon on incite au licenciement abusif.

S. On met à mal tout le dispositif de réparation du préjudice hors du droit du travail.

R. – La loi Larcher de 2007 venue après l’épisode du CPE, obligeait à une consultation des acteurs ssociaux avant toute loi modifiant le droit du travail. Cela ne s’est pas passé comme cela pour la loi El Khomry. Pour les ordonnances le processus a été différent. Des consultations ont eu lieu pendant tout l’été. Elles ont satisfait les acteurs sociaux…avant la découverte de la loi. L’accord de branche en est sorti plus respecté mais les organisations syndicales s’attendent à un hiver plus difficile.

Q8. Vous dites qu’on est qu’au début d’un processus de révision de notre organisation sociaale, les syndicats y sont-ils préparés ?

R. L’accord sur l’ASSEDIC s’est fait pour éviter la menace de nationalisation des cotisations « employeur »

Q10. Place des représentants du personnel dans les conseils d’administration ? On en n’a pas parlé alors que c’est important pour la confiance

R. Était-ce vraiment demandé par les syndicats ? La CFDT oui, la CGT ? C’est une question de prise de responsabilité dans les décisions stratégiques d’une entreprise.

Q11. Vous n’avez pas répondu à la question posée par la lettre d’invitation. À Vrai dire on s’y attendait.

Les réformes n’ont pas prouvé leur efficacité ailleurs mais nous avons plus de chômage qu’ailleurs….

                                                                                                          Gérard PIKETTY

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